• FOIRE JAMBON
     

    Le « vrai » travail ?



    Le “vrai” travail ? Celui des 650 accidents mortels, des 4500 mutilés du travail ? Celui des droits violés et des heures supp' impayées ?
     
    Le « vrai travail » ?  Celui des maladies professionnelles, amiante, TMS, surdité, cancers, qui augmentent, sont sous-déclarées, sous réparées.
     
    Le “vrai” travail ? 150 000 accidents cardiaques et 100 000 accidents vasculaires par an dont entre 1/3 et 50 % liés au travail...
     
    Le “vrai” travail ? Ce jeune ascensoriste de 26 ans écrasé par l'engin qu'il réparait, à cause de la compétition sauvage entre OTIS et KONE
     
    Le “vrai” travail ? Et les milliers d’ouvriers désamianteurs qu'il laisse en ce moment mourir sans protection par refus d'un moratoire ?
     
    Le “vrai” travail ? Celui des mini-jobs, des stages, des emplois saisonniers atypiques, des 3 X 8, des 4 X 8, des intérims et CDD répétés ?
     
    Le "vrai" travail ? Celui des millions de travailleurs pauvres qui n'arrivent pas à vivre avec leurs salaires ?
     
    Le "vrai" travail ? Celui du milliard d'heures supplémentaires non déclarées, non majorées, non payées attribuées à ceux qui ont un boulot au détriment de ceux qui n'en ont pas ?
     
    Le « vrai » travail ? Celui des femmes qui gagnent 27 % de moins que les hommes ?
     
    Le « vrai » travail ? Celui des jeunes à 25 % au chômage et à 80 % en CDD ?
     
    Le « vrai » travail ? Celui des immigrés, forcés à bosser sans droits et sans papiers par des esclavagistes et marchands de sommeil franchouillards ?
     
    Le « vrai » travail ? Celui des seniors licenciés, 2 sur 3 a partir de 55 ans et qui ne peuvent cotiser que 35 annuités alors que 42 sont exigés dorénavant pour une retraite décente ?
     
    Le "vrai travail" ? Celui des restaurateurs dont 1 sur 4 utilisent des clandestins, non déclarés dans le fond de leur cuisine ?
     
    Le “vrai” travail ?  Celui des exploitants agricoles qui tuent des inspecteurs du travail pour pouvoir abuser d'immigrés clandestins ?
     
    Le “vrai” travail ? Celui des beaufs de la CG-PME, des cadres casques oranges de chez Bouygues, des marchands de manœuvre appelés « viande » ?
     
    Le “vrai” travail ? "La vie, la santé, l'amour sont précaires pourquoi le travail ne le serait-il pas?" (Parisot/Sarkozy)
     
    Le “vrai” travail contre le droit du travail ?  Le pauvre exploité qui sue et se tait, la dinde qui vote pour Noël !
     
    Le “vrai” travail "sans statut" ? "La liberté de penser s'arrête là où commence le Code du travail" selon Mme Parisot et... M Sarkozy
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    Le “vrai” travail sans syndicat ? Sans syndicat pas de Smic, pas de durée légale, pas de congés payés, pas de sécurité sociale, pas de droit
     
    Le “vrai” travail ? Celui qui ne fait jamais grève, qu'on ne voit jamais manifester, qui n'est pas syndiqué, qui piétine son collègue ?
     
    Le « vrai » travail ? Celui sans délégué du personnel, sans comité d’entreprise, sans CHSCT, sans institution représentative du personnel ?
     
    Le “vrai” travail ? à France Télécoms, des dizaines de suicides, faute inexcusable du patron de combat qui licencie, stresse, vole, tue
     
    Le “vrai” travail ? Parlons-en ! Stress, risques psychosociaux, harcèlement, suicides, chantage à l'emploi, heures supp' impayées ?
     
    Le “vrai” travail ? Les travaux les plus durs sont les plus mal payés, bâtiment, restauration, nettoyage, transports, entretien, industries
     
    Le “vrai” travail ? Qu'est ce qu'il y connaît ? Dans le bâtiment, 1,1 million bossent surexploités, maltraités, mal payés, accidentés, meurent sans retraite
     
    Le « vrai » travail ? Celui des 900 000 foutus dehors par « rupture conventionnelle » de gré à gré sans motif et sans mesure sociale ?
     
    Le « vrai » travail ? Celui des auto-entrepreneurs, un million en théorie, la moitié en réalité, qui se font exploiter comme faux salariés, à bas prix et sans protection sociale ?
     
    Le “vrai” travail ? celui qui bosse dur pour survivre misérablement ou celui qui exploite dur les autres pour vivre dans des palais dorés ?
     
    Le “vrai” travail ? celui des actionnaires, des rentiers, des riches, des banksters du Fouquet's qui gagnent 600 SMIC par an en dormant ?
     
    Le « vrai » travail, celui de Maurice Levy patron qui se ramasse 16 millions d’euros d’argent de stocks option de poche pillés sur les richesses produites par les salariés.
     
    Le « vrai » travail ? celui de Molex, de Sea France, de Gandrange et Florange, de Continental, de Lejaby, de Pétroplus, des Fonderies du Poitou, de toutes celles et ceux qui ont du se battre pour le garder ?
     
    Le “vrai” travail ? Qu'est ce qu'il y connaît  M. Sarkozy ? Lui qui n'a jamais passé la serpillière dans une cantine ni poussé un chariot.


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  • APAJH
     

    Un membre des Chemins du Passé à l’honneur

    Vendredi 27 avril, Jean Auroux, ancien Ministre de François Mitterrand, remet la médaille de Chevalier de l’Ordre National du Mérite à Roger Chatelard, président départemental et Trésorier Général de la Fédération des APAJH.
    A travers cette cérémonie, c’est l’ensemble du mouvement APAJH qui est salué, et l’utilité sociale des corps intermédiaires reconnue.



    L’APAJH Loire est membre de la Fédération des APAJH et met en œuvre les trois valeurs de « laïcité, citoyenneté, et solidarité », dans deux établissements : un Centre d’Action Médico-sociale Précoce, et un établissement proposant aux personnes en situation de handicap avançant en âge, un accompagnement éducatif, thérapeutique et social personnalisé, le Foyer APAJH « le Collège ». Le Centre d’Action Médico-sociale Précoce est à Montbrison tandis que le Foyer Occupationnel et le Foyer d’Accueil Médicalisé sont aux Salles et accueillent respectivement 15 et 27 résidents, dont deux places d’accueil temporaire.


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  • PETIT DERAILLEMENT SUR LA DESSERTE ROANNE-TARARE

     

    Un beau matin de fin d’hiver 1944-1945, j’assure avec la 240 A1 la desserte marchandises Roanne – Tarare, avec échange de wagons dans toutes les gares. Le train pas trop lourd grimpe allègrement la montée du col des Sauvages. On entre dans le tunnel à la seule lueur de l’abri de la machine faiblement éclairée par une lampe à acétylène (calborne en argot de métier). A peine la descente amorcée mais n’ayant pas encore pris de la vitesse, la loco s’est soulevé du côté droit, le coin de l’abri est venu frotter la paroi gauche du tunnel puis la machine s’est immobilisée en se redressant légèrement. Après récupération, à tâtons, de notre lampe, nous nous apercevons que notre tender est monté sur un tas de cailloux. Contact pris avec le chef de train secoué par l’arrêt brutal, nous constatons que le tas de pierres monte jusqu’à la voûte de la voie d’à côté : le tunnel s’est éboulé…

     

    Ultérieurement nous apprendrons que l’éboulement est dû aux conséquences du dégel d’un puits d’aération. A l’autre bout du train, le chef de train (chargé de distribuer les wagons dans les différentes gares) redescend sur Amplepuis et avec le chauffeur nous traversons le tunnel dans la direction de Tarare et allons à pied jusqu'à la gare. La circulation des trains est interrompue pendant plusieurs semaines entre Amplepuis et Tarare. Quand la machine est entrée au dépôt de Roanne, elle était rouge de rouille……

      Ce témoignage est fournit par M. Henri Bonnard qui fut en son temps, le plus jeune « mécanicien » (conducteur de locomotive) de France…

     

    Je vous invite à lire sa suite de ses mémoires et beaucoup d’autres choses dans la quarantaine de pages de  l’excellent Journal trimestriel :

      AIX-ECHOS du canton de Saint-Germain-Laval 

     BP 15

     42260 St-GERMAIN-LAVAL

     Tél. Et Fax : 04 77 65 43 65


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  • 2° PRIX DU GAI SAVOIR

     

    CHIENNE DE VIE

     

    Musique douce, ambiance feutrée, surprise partie chez les canins !

    Caniche Royal, noir comme un geai, d’humeur farceuse, après une toilette dite   « à la lion », présidait au bon déroulement de la cérémonie assis sur son couffin jaune d’or à l’ombre du grand chêne ; près de lui sa fille, Caniche Abricot, reluquait l’assemblée à la recherche de quelques prétendants ; on soupçonnait sa mère d’avoir aimé un courtisan à la robe fauve ce qui avait permis d’obtenir le teint très particulier de la jeune fille. Mais Caniche Royal s’en moquait, il était fasciné par son impétueuse enfant et lui pardonnait même quelques extravagances alimentaires ; en effet Abricot était végétarienne. Cela amusait beaucoup les amis de son père ; comment une personne aussi raffinée que la damoiselle pouvait tomber dans ce travers alimentaire, la question, maintes et maintes fois posée, n’avait trouvé aucune réponse à ce jour.

     

    Rottweiler câlin avait été désigné pour surveiller les entrées et empêcher toute tentative de fraude ; étant de vieille noblesse Caniche Royal semblait un peu cabot, on aurait dit snob chez les humains, et ne voulait à aucun moment côtoyer les chiens errants. Mais tout le monde connaissait Rottweiler ; on le savait sensible aux charmes des dames et quelques roturiers entrèrent contre la promesse de récompense s de choix.

    Sur le couffin royal quelques croquettes apéritives avaient été déposées, accompagnées d’une large assiette d’eau claire.  Certaine mauvaises langues disaient que Caniche Royal se lançait souvent dans la dégustation d’une eau colorée, on ne savait pas ce qu’il ajoutait à sa boisson, peut-être une vitamine, peut-être des amphétamines.

     

    Un bien heureux brouhaha régnait sur le terrain ; les gamelles emplies de nourriture les plus diverses, gâteaux, quelques viandes attirant les mouches, les boissons d’eau fraîche ou tiédie pour les plus exigeants offraient leurs odeurs les plus tenaces. On avait repéré déjà quelques gourmands dans l’assemblée qui repartaient en emportant entre leurs dents des os pour les plus jeunes, des pâtisseries pour les plus âgés. Ainsi pensait Caniche Royal, impossible de dissimuler son âge, les dents sont les premières à le trahir !

    Il jeta un regard attendri vers son enfant qui loin de tout ce remue-ménage broutait tranquillement les feuilles de pissenlit.

    « Mon Dieu, comme elle est différente des autres ; de tout mes petits loups (terme qu’il employait affectueusement pour désigner les résidents de son royaume), c’est bien elle qui possède le plus de classe ».

     

    Cependant, cette petite fête laissait quelques malheureux sur le derrière de la salle, et les invités n’avaient pas tous l’air épanoui. Certains aux yeux larmoyants reniflaient sans que l’on sache que dans le royaume de Caniche Royal, il se passait des soirées étranges où l’on entendait au loin des terrible hurlements.

     

    Dog faisait la gueule, il avait perdu la boule pour Yorkshire échevelée et coquine, arrivée un mois auparavant des Etats-Unis. Elle lui avait claqué la porte au museau le soir où Dog, un peu plus hardi, avait laissé comprendre qu’il bavait d’admiration devant elle, et qu’il souhaitait renifler un bout de chemin à ses côtés. La belle lui avait répondu un peu vertement qu’elle ne souhaitait pas cheminer avec lui car  elle n’appréciait que les odeurs de la ville.

     

    Un peu plus loin, Lasha prénommée Apso reniflait paisiblement les mets exposés sur le sol, pendant que Pékinois évitait de se trouver à proximité de mâchoires voire de regards ; nul ne savait d’où remontait la rancune entre les deux belles. Certains chuchotaient que toutes deux aimaient le même Labrador, Chocolat, que toute la gente féminine trouvait « à croquer » car il était tendre comme un ange. Apso et Pékinois s’évitaient donc et parfois se contemplaient en chiens de faïence ! D’ailleurs l’un et l’autre l’affirmaient que leurs pays d’origine ne s’entendaient pas non plus et qu’il était donc hors de propos de se lier d’amitié. Apso aboyait des phrases qu’elle avait désignées comme « mantras » ce qui agaçait profondément Pékinois.

     

    Plus éloigné encore, Berger Allemand comptait les participants, vieille habitude ! On pensait même qu’il était un grand mathématicien car il ne s’endormait qu’après avoir atteint le chiffre cent. Personne ne savait pourquoi il éprouvait ce besoin de toujours compter ; à ces compagnons les plus intimes, il avait avoué un soir de beuverie que son arrière-grand-père était gardien d’un troupeau de moutons, et que, depuis la famille par respect pour l’ancêtre, apprenait aux enfants du clan le bonheur des chiffres. On estimait aussi sa fortune à une centaine d’os récupérés dans les endroits les plus divers.

     

    Depuis la naissance de l’Europe, il ne voulait plus qu’on le désigne par Allemand ! On lui expliquait qu’il fallait bien employer ce terme pour le différencier des autres Bergers, mais il grondait en retroussant les babines, et ses dents impressionnantes faisaient taire les plus hardis.

     

    Seul Corniaud, plus batailleur osait le contrarier ; en indiquant que la politique ne pouvait détruire tous les particularismes et qu’il était parfois préférable de ne pas perdre son identité. Berger répliquait en grondant que si la communauté des canidés avait été créée plus tôt, certaines batailles inutiles auraient pu être évitées. Corniaud qui aimait jouer à la guerre partait en montrant les crocs.

     

    Personne, d’ailleurs ne savait qui s’était permis d’inviter Corniaud à la fête car il ne supportait pas Caniche Royal ; il le surnommait en souriant « ma poule » depuis que Caniche Royal avait dévoré le coq du voisin ! Fameuse histoire qui avait entachée la réputation du Caniche à jamais !

     

    Mais quelques participants à cette surprise-partie affirmaient que Corniaud avait pu entrer dans le lieu festif car il était l’amant de Chow Chow, l’artiste devant se produire ce jour ; on le tolérait et certains le toisaient en souriant méchamment, on le bousculait un peu montrant ainsi la petitesse de sa condition. Mais Corniaud ne s’en offusquait pas, il n’était peut-être pas le plus beau et le plus noble, mais certainement le plus solide et le plus malin. Corniaud le Renard était son surnom dans la meute des chiens de rue.

     

    Epagneul Breton et Gascon Saintongeois se pavanaient en affirmant que, justement, ils étaient là pour défendre les noms d’origine et ils étaient fiers de porter un signe distinctif. Ils affirmaient que c’était la seule façon de ne pas se perdre dans la meute, et qu’ils restaient heureux en ayant ce genre d’étiquette : ils se trouvaient un peu isolés mais aussi bien distingués !

     

    Dalmatien, que les jaloux enviaient tout en le nommant « la panthère noire » rosissait de bonheur au sein de la confrérie canine. Depuis qu’un célèbre cinéaste l’avait immortalisé il paradait comme une star, le blanc et le noir sont du plus grand chic il en était persuadé.

    Parfois la nuit on l’entendait rêver, et les cruels le laissaient se débattre avec son ennemie féroce qui le faisait hurler dans ses cauchemars : « Cruella ». Parfois on aurait presque pu le surprendre à ronronner de plaisir quand il affirmait avoir eu cent un petits !

     

    Brusquement, un remous dans la salle et tous les yeux se fixèrent sur Braque de Toulouse : un aboiement fit taire les plus bavards ; il faut dire que Braque se vantait d’être un bon aboyeur car son arrière-grand-père gardait les coulisses du Capitole.

     

    « Chow Chow commence son numéro ! Silence, je ne veux plus voir un os bouger ni entendre un seul grognement, sinon, vous vous retrouverez dehors, sans domicile fixe, et je vous préviens ce n’est pas un temps à mettre un chien dehors ! Que la musique commence ! »

     

    Alors, devant nos yeux émerveillés et nos babines presque souriantes, un spectacle digne des grandes stars se déroula : Chow Chow, dans un déhanchement savant s’avançait vers le couffin royal. Elle roula à terre, frémissante de bonheur, tenant dans sa mâchoire un superbe tibia, humain avait-elle précisé avant de commencer ; or la rumeur courait que ce ne pouvait être humain car trop gros ; on soupçonnait l’artiste d’avoir exploré une poubelle et d’avoir déniché sa merveille au milieu des détritus ménagers.

     

    Les belles entretenaient soigneusement cette histoire en bavant d’envie. Elles surveillaient férocement leurs compagnons canins, et le moindre frémissement de leur part entraînait immédiatement un ronflement de jalousie. Cependant nul n’aurait jamais osé montrer une attention soutenue à la belle Chow Chow car on savait son « mari » le Corniaud fou d’elle.

    Blanche, la coton de Tuléar, trépignait de rage, sifflait en dénonçant un spectacle indigne de sa caste royale ; le chanteur Barzoï, spécialement invité pour donner son opinion sur le spectacle, ne savait plus s’il devait continuer à chanter pour Blanche ou pour Chow Chow, créant ainsi au sein du clan une animosité presque palpable.

     

    Seul Golden Retriever chantonnait « ma pomme, c’est moi, je suis heureux comme un roi ! » En accompagnant sa litanie d’un battement de queue sur le sol.

     

    Habilement, le Berger de Brie, surnommé putois par ses ennemis, tentait de se frayer un passage plus près du podium, mais il était aussitôt repoussé par les admirateurs de Caniche Royal qui avait décrété, un jour qu’un chien portant un prénom de fromage ne devais pas être admis à sa cour.

     

    Plus loin, Fox Terrier grattait frénétiquement la terre, envoyant herbes et pierres bien au-delà de la distance réglementaire. Sa vivacité, et son maintien digne du chien des près, de poubelles aurait dit Caniche Royal un jour d’agacement, donnait à la soirée un air campagnard fort peu prisé de la cour. Quand on lui demandait pourquoi il s’évertuait à creuser ainsi, il avouait, l’air confus, que des os se cachaient parfois dans des endroits les plus inattendus, et qu’ainsi, il s’était juré de jouer à l’humain les jours de soldes, c’est-à-dire gratter tout ce qui tombait sous ses pattes à n’importe quel emplacement.

     

    Boule de Neige, le Husky de service au maintien de la propreté sur le terrain, ne savait plus à quel chien se vouer, car tous et toutes paraissaient pris d’une envie de plaisir qui le faisait rougir. Venant du froid, il ne comprenait pas cette turbulence, et cette anarchie dans le comportement ne lui convenait pas du tout. Secret et timide il s’éloignait à regrets quand il rencontra Coton de Tuléar, l’immigrée arrivée le matin même, et sauvée par une expédition de la S.P.A. La belle semblait perdue dans cette frénésie de mouvements et d’aboiements. Elle racontait à tout le monde que son rang serait reconnu et qu’elle ne serait plus contrainte de fréquenter tous ces assoiffés. Elle prétendait n’avoir connu que des rats de bibliothèque, ce qui expliquait son grand savoir. Mais en croisant Boule de Neige elle minauda un « bonsoir, ça va ? » car elle avait reconnu en lui un compère philosophe. Ce philosophe, émerveillé par la robe de la belle, évidemment tomba amoureux fou, et nos deux amis partirent patte dessus patte dessous en se contemplant dans le blanc des yeux.

     

    Plus loin Basset Hund, l’espion se service, laissait tomber ces oreilles de découragement ; lui aussi avait repéré Coton de Tuléar, et en inspecteur de la cour n’avait rien trouvé de désagréable au pelage soyeux et immaculé de Blanche ! Il pensait même qu’explorer un peu cette perfection lui permettrait de découvrir une forme de drogue cachée dans les longs poils de la belle. Il s’apprêtait donc à  suivre nos deux tourtereaux quand son attention fut attirée par un mouvement imperceptible vers sa droite.

    Le majordome, Chien chinois, dit chien nu, partait chercher Caniche Abricot et l’accompagnait sur la scène du théâtre où Chow Chow venait de terminer son show : la belle suait abondamment et les jalouses entres elles se lançaient des regards souriants ; « Chow Chow a chaud, elle est en feu ; vilaine après le spectacle, sentant le fauve ! » Ah le bonheur qu’elles éprouvaient !

    Caniche Abricot prit le jappement :

    « J’ai quelque chose à vous confier, je vais vous raconter une histoire. Asseyez-vous sur votre derrière ».

    Corniaud demanda : « Ah bon c’est une histoire un peu osée ? »

    Quelques uns grondèrent considérant qu’un chien de basse condition ne devait pas s’adresser à une princesse avec autant de désinvolture ; mais la Princesse lui sourit gentiment et répondit :

    « Non, mais je l’ai inventée parce que j’aime bien mon prénom Abricot, tout un programme ; alors écoutez :

     

    - Cher Ananas, je vous adore. Je me paierais bien une tranche de bonheur en votre compagnie, bercé par votre douceur, ému par votre aspect chatoyant.

    - Dîtes donc monsieur Saladier, restez correct. Déjà je supporte la Louche qui se comporte de façon louche ; l’Ecumoire qui ne brille pas par sa délicatesse compte tenu de son nom ! Alors, permettez-moi de ne pas apprécier vos avances.

    - Que se passe-t-il ?

    - Oh ! Vous la Fraise, ne la ramenez pas. On connaît votre art pour débaucher Banane, et jeter les peaux usagées un peu partout !

    Fraise, rougissante de colère, se terre au fond du plat.

    Poire qui, naturellement, est bonne, essaye de calmer la situation :

    - Ne vous irritez pas ; Citron arrive ! Il va encore nous lancer sur un ton acide :

    - Poussez-vous un zeste, je coule.

    - Alors, chantez plutôt, dit en riant Pomme. Créons la chorale des « Pommes, Pommes, Pomme ».

    - Noix, dit la petite Noisette, je voudrais devenir Poudre quand vous vous battez ainsi, et me glisser dans le verre du canon de beaujolais !

    - On t’a déjà dit qu’on ne prononce pas « noix » mais « moi » chantonne Cerise sur l’air bien connu de son temps !

    - Qui vit ici ? Demande Kiwi, vert de peur.

    - Ne craint rien minaude Feuille de Menthe. Ta couleur me plait !

    - Bon on se hâte ! Tout le monde en place ! Je donne le tempo annonce, majestueuse, Horloge.

    - Il est midi et l’heure d’être croqué est venue ».

     

    Un silence assourdissant régnait dans le pré ; les invités se regardaient éberlués ne comprenant rien à cette fable. « Seul Saint-Bernard  un bon gros chien, doux et gentil, qui avait troqué depuis bien longtemps son tonnelet de rhum, contre une sacoche de courrier qu’il distribuait chaque matin, reliant de niche en niche ses congénères, souriait malicieusement » (1).

    Quand, soudain un énorme fracas se fit entendre : on vit un  chien, Belge de son état, se dresser et tourner, tourner : « Bravo, bravo Abricot, c’est une véritable histoire comme seuls les chiens Belges savent les écrire ! Ah que je t’aime, veux-tu m’épouser ? Viens je t’offre mes pattes pour une vie commune ».

     

    Abricot reculant et presque rougissante ne savait que répondre. Caniche Royal descendant de son couffin, vint chercher sa fille et affirma qu’une telle intelligence royale ne saurait épouser qu’un roi et qu’il consentait à l’union avec la Belgique si son adorable fille le voulait.

    Une clameur de joie éclata dans la nuit !

    Laissons-les … à mon avis, entre chien et loup, la soirée sera chaude ; mais Chien Policier veille ! La direction de la SPA l’a affirmé !

     

    « Au fait se dit François le directeur du refuge en s’éveillant en sursaut, c’est quoi cette histoire ; fallait-il que je sois fatigué pour m’endormir au bureau ! »

    Il laissa son regard explorer le grand par et sourit « ils vont me rendre fou ces clébards, mais je les aime tous ! »

     

    Quelques jours plus tard, tous les animaux se retrouvaient dehors, un grand frémissement de joie et François passait au milieu de ses « amis » en leur promettant une vie plus douce, un confort de maison douillette. Les passants, éberlués, entraient et se laissaient attendrir ; seul Abricot et Berger Belge restaient sur le seuil de l’abri ; il fallait bien sûr les adopter tous les deux, hors de question de les séparer. Il y eut à nouveau une grande fête, et les humains, ravis de se trouver en compagnie des chiens laissaient parler leur tendresse.

     

    (1) paragraphe ne paraissant pas dans le texte initial.


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  •  

    PRIX DU MODERN’STYL

    Ce texte a eu la distinction du jury

     

     

    Le cri du regard

     

    Vivre au pays du sans-abri

    Rêver le ciel couleur de pluie

    Fermer les volets des maisons

    Murer l’espoir d’un horizon

    Idées des cités démunies

     

    Et sur la palette de l’Oubli

    Vision de l’humain désuni

    Les regards fuyant des piétons

     

    V ivre au pays du sans-abri

     

    Le chien auprès de son ami

    Un air de tendresse frémit

    Chante l’abandon, les saisons

    L’être sombre en déraison

    Et l’esprit se meurt sans un cri

     

    Vivre au pays du sans-abri


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