•  LES GENS DU VOYAGE : UN PROBLÈME QUI NE DATENT PAS D'AUJOURD'HUI

    Article tiré de l’Almanach 1872 (Couverture ci-dessus)

    LES CAMPS-VOLANTS ET VOLEURS

    Nous commençons à retrouver sur nos routes et nos grands chemins ces familles nomades et vagabondes connues sous le nom de camps-volants.

     

    Avant la guerre, et depuis de nombreuses années déjà, ces hommes et femmes, que souvent aucun lien civil ou religieux n’a réunis, étaient devenus très nombreux. Leurs enfants plus nombreux encore fatiguent les voyageurs de leurs importunités, et prélèvent sur nos villages, en secours de toutes natures, de fortes contributions.

     

    Nous avons tous dans notre voisinage et à notre connaissance des familles pauvres et laborieuses qui vivent beaucoup plus mal que ces inconnus dont la seule occupation est de traîner de village en village leur perpétuelle oisiveté.

     

    Quelques-uns ont un métier ou une industrie : mais c’est presque toujours insuffisant pour les faire vivre et ils restent plus ou moins à la charge de la charité publique. Qui n’a entendu à ce sujet se plaindre de la police ? Elle devrait, dit-on, surveiller tous ces gens sans feux ni lieux, car il s’en faut qu’ils soient toujours honnêtes. La marmite qu’ils établissent sur le bord de la route s’alimente avec les de pommes de terre des champs voisins et se chauffe avec les échalas des vignes environnantes.

     

    On se fait aujourd’hui une réflexion désobligeante pour tous ces rôdeurs, elle n’est que trop fondée : c’est que ces mêmes hommes qui vivent à nos dépens en temps de paix ont servi nos ennemis pendant la guerre. On dit même que, sous le déguisement de petits marchands ambulants, des espions Prussiens ont exploré la France.

     

    Les sociétés secrètes se servent aussi de ces intermédiaires. A la veille des crises déplorables que ces sociétés nous ont fait traverser, l’observateur attentif a pu voir circuler plus nombreux et plus actifs les ouvriers cherchant de l’ouvrage, les colporteurs de bijoux et de lunette, ou simplement de crayons ou de papier à lettre. Je me suis demandé plus d’une fois comment on pouvait vivre et même se payer de temps en temps le luxe des 3° en chemin de fer avec les bénéfices d’un commerce dont la mise de fonds au grand complet va bien à 5 francs. Mais les propos que j’ai entendus de la bouche de ces voyageurs m’ont fait penser que le commerce inoffensif des plumes de fer ou d’acier cachait un autre commerce beaucoup moins innocent.

     

    Il est donc à souhaiter que la police s’occupe de tous ces vagabonds. Quand on a de la fortune, on peut se permettre la fantaisie de changer de place continuellement ; on n’incommode personne. Si même le cœur vous en dit, vous pourrez vous préparez une épitaphe originale comme celle que se donna au siècle dernier le chevalier de Boufflers :

     

    « Cy gist un chevalier qui sans cesse courut,

    Et qui sur les chemins, naquit, vécut, mouru,

    Pour prouver ce qu’a dit le sage

    Que notre vie est un voyage »

     

    Mais quand on n’a à colporter de porte en porte que du sable noir ou jaune pour nettoyer les chenets, m’est avis qu’il faut rester chez soi, si on a le bonheur d’avoir un chez soi, ou du moins il faut se fixer quelque part et travailler ; sans quoi le gendarme pourra sans être trop curieux, vous interroger sur vos moyens d’existence, et s’il n’est satisfait de vos réponses, restreindre votre liberté d’aller et de venir.

     

     

    L’ordre public et les bonnes mœurs y gagneront. L’agent de police lui-même sera beaucoup mieux dans son rôle qu’en surveillant les honnêtes gens, comme cela se faisait trop souvent sous l’Empire. Chacun son métier…, et il n’y aura pas que les vaches qui seront bien gardées.


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    "Un amour rêveur " poème de Martine Goblet


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  • UN LOTO (VACHES) INÉDIT EN PREPARATION

     


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