• QUELQUES NOTES SUR LES MARÉCHAUX FERRANTS DE LA REGION DE FIRMINY (LOIRE)

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    QUELQUES NOTES SUR LES MARECHAUX FERRANTS DE LA

    REGION DE FIRMINY (LOIRE)

     

    Le territoire de Firminy est situé sur le passage de la route nationale n° 88, ancienne route impériale de Lyon à Toulouse, ancienne route royale et moyenâgeuse de Lyon en Languedoc.

     

    Firminy joua un rôle assez important dans l’histoire du roulage, du fait de sa situation d’abord et aussi par suite de son industrie de la clouterie à main qui date du XVII° siècle.  Il y avait à Firminy de nombreux rouliers, les uns allaient en Auvergne sur le rivage (du Rhône), ou dans le midi chercher du vin, d’abord à dos de mulet dans des outres, plus tard sur des charrettes. Les convois qui emportaient les caisses de clous, revenaient chargés (en outre du vin), d’oranges, de tissus, de laine, de tabac, de poudre. Dans ce dernier cas, le convoi était, d’étape en étape, accompagné de deux gendarmes.

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    A la sortie de Firminy, en allant vers le Velay, se trouvaient la dure et longue côte de Saint-Ferréol. Cette montée avait nécessité la création de renforts. Au quartier du Logis-neuf, on voyait jusqu’à la guerre, les vestiges des grandes auberges, gîtes d’étape des rouliers, et surtout des vastes écuries où se reposaient les mulets et chevaux des rouliers, et où se trouvaient les mulets et chevaux qu’on empruntait comme renfort pour franchir la redoutable côte. (Ces écuries sont, pour la plupart, devenus des garages d’autos).

     

    C’est encore dans ce quartier que se trouvaient les bourreliers et les maréchaux.

     

    Firminy fût, de tous temps, un bourg important. La boutique du maréchal était assez vaste, quoi que sombre. Il y avait généralement une porte sur la rue et une fenêtre, la plupart du temps devant laquelle se trouvait l’étau à limer et les principaux outils. La proximité du charbon et son bas prix, empêchait l’emploi de tout autre combustible

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    La forge ressemblait à toutes les forges de village. Il y avait un ou deux soufflets (qu’on fabriquait à Firminy où cette industrie est contemporaine de la clouterie). Le forgeron ne s’occupait pas de serrurerie, cette industrie étant localisée à la Ricamarie et à Saint-Bonnet-le-Château. A Saint-Genest-Lerpt, on fabriquait des mouchettes depuis le XVII° siècle.

     

    En dehors du ferrage des chevaux, mulets et vaches, le forgeron s’occupait un peu de ferronnerie et de Taillanderie.

    A proximité de la forge, sous un « chapit » (petit abri) se trouvait le « travail » à ferrer les vaches. Cet instrument s’appelait en patois « en’engin ». L’outillage était celui de tous les forgerons.

     

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    Le forgeron s’occupait très rarement de charronnage, et c’est le charron qui cerclait les roues. Pourtant dans les petits villages de campagne, ces deux professions se combinaient assez souvent. Le forgeron réparait les machines agricoles.

     

    La boutique des forgerons de Firminy, comportait toujours un ou deux bancs où venaient s’asseoir les oisifs où les anciens du village, pour deviser et chauffer. On y consommait pas mal de litres de vin, surtout au XIX°. Autrefois on y buvait du cidre de pays ou de la piquette.

    Le forgeron était parfois rebouteur et assez souvent il arrachait les dents. La boutique était jadis (avant que les gens achètent le journal) l’endroit où l’on apprenait les nouvelles et où l’on commentait les évènements. C’est là que les campagnards puisaient les seuls renseignements qu’ils emportaient dans les hameaux.

     

    On y faisait aussi de la politique, et souvent de la politique assez avancée. Sous l’Empire c’était le lieu de réunion des républicains. On y préparait les élections municipales, et la puissance de ces officines ou parlottes était très redoutée des candidats.

    Dans une forge de Firminy se réunissaient sous l’Empire les disciples de Mesmer, on y discutait spiritisme, quelques personnes possédaient des livres rares ou redoutés ; on y lisait le grand et le petit Albert.

     

    On y chantait aussi, le compagnon surtout, en tirant le soufflet, de vieilles chansons françaises ou en patois, mais les chansons en patois de Firminy sont assez rares. On y chantait des chansons en patois de la Haute-Loire, car l’influence languedocienne était très forte dans notre canton, et aussi du patois gaga (Chapelon, etc.).

     

    A Unieux, le forgeron Bernard, dit Le Fin, était un esprit très indépendant. Il lutta contre l’Empire. Dès la proclamation de la République. Il mit à sa fenêtre un buste de la République entouré de drapeaux et de lampion. Comme ses confrères, il s’amusait à faire aux paysans de grosses farces et abusait un peu de leur crédulité.

     

    Ce forgeron, d’ailleurs très intelligent, avait inventé et fait breveter en 1870 une machine à matricer des fers à bœufs.

     

    Sans appartenir à une confrérie, les forgerons fêtaient aussi la Saint-Eloi par des libations dans leur boutique. A cette occasion on faisait cuire la saucisse à la forge et on la mangeait sur place en buvant du cidre ou du vin.

     

    La boutique du maréchal était surmontée d’une panoplie formée d’un panonceau portant le nom du maréchal et tout autour, au bout d’une tige, des fers de toutes les formes imaginables.

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    Pendant longtemps, les forgerons de Firminy firent leurs clous eux-mêmes.

     

    Les apprentis forgerons venaient de la Haute-Loire ou des campagnes environnantes.

     

    Actuellement il reste quelques maréchaux-ferrants à Firminy ou dans les environs, soit pour les paysans et les nombreux voituriers artisans qui font le transport du charbon pour les particuliers, soit pour les chevaux de mines.

     

    Dans les très anciennes carrières de pierres (grès houiller) de Firminy, on employait pour tirer les blocs de pierre du fond de la carrière, des sortes de grands tourniquets verticaux appelés « vargues », le câble s’enroulait autour d’un axe central. La machine était mue par un cheval. Les voitures des carriers donnaient aussi du travail aux forgerons.

     

    Mais dans la région de Firminy la boutique du maréchal était fortement concurrencée par la boutique du cloutier. Là aussi, il y avait un banc pour les amis ; là aussi, on faisait de la politique, on chantait de vieilles chansons, on buvait force bolées de cidre et force litres de vin du Rivage ou du Beaujolais.

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    On y racontait les vieilles histoires en patois, des gaudrioles, on mystifiait les plus naïfs et pour que le cloutier ne perde pas son temps, un assistant tirait le soufflet pendant qu’il forgeait.

     

    D’une façon générale, le maréchal et le charron se partageaient les travaux de taillanderie et de réparation des pièces de machines agricoles.

     

    Albert Boissier (Bibliothécaire – Archiviste) Revue de Folklore Français années 1930


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