• LES LOUPS DANS LA PRESSE ROANNAISE A LA FIN DU XIX° SIECLE

     

    LES LOUPS DANS LA PRESSE ROANNAISE A LA FIN DU XIX° SIECLE

     

    Enfant, j’ai écouté maintes fois, dans une terreur à peine contenue, l’histoire du pauvre tailleur d’habits de Noirétable, qui un soir d’hiver, s’étant trop attardé au couvent de l’Hermitage et redescendant par bonds, à travers la forêt à la nuit tombante, par la coursière de Vérines, chuta si maladroitement dans un piège caché dans les branchages, qu’il ne parvint plus à se délivrer lui-même. Pendant toute la longue nuit glaciale, il n’eut pour compagnon qu’un loup, venu là comme par exprès narguer l’homme pris qui voulait prendre. Le malheureux ne dut son salut qu’aux grands ciseaux qu’il portait toujours à sa ceinture et qu’il fit cliqueter la nuit entière pour effrayer et décourager son redoutable adversaire en attendant le passage matinal du premier pèlerin qui le délivrerait.

     

    Alors que les documents officiels semblent indiquer une diminution des loups vers la fin du XIX° siècle, la presse au contraire, dans le même temps, accueille davantage de mentions concernant cet animal redouté. Comme pour d’autres enquêtes antérieures, il convient de relativiser la fréquence des données en fonction de l’évolution des journaux. D’une par le volume des hebdomadaires consultés qui permet mieux, à partir, des années 80, l’insertion de petites rubriques locales ; d’autre part l’organisation d’un réseau de correspondants plus lointains favorise le passage des informations en provenances de l’arrière-pays.

    Du reste, ces relations sont assez banales et ne permettent guère d’approche scientifique (localisation, dénombrement des animaux, etc.) Au fil des ans, voici cependant ce qu’il est possible de retenir et que Jean Canard avait d’ailleurs largement cité dans un travail antérieur.

     

    1837 – Un homme du village d’Arfeuilles, mordu à la cuisse par une louve, se rend à Mailly pour se faire « panser ». Il faut entendre qu’il est allé trouver un  rebouteux réputé pour une recette antirabique. Le rédacteur tente de désabuser.

    (Écho de la Loire, 28 octobre 1837).

     

    1845 – On apprend qu’un jeune homme de 26 ans a été mordu par balle au cours d’une chasse au loup au Chambon-Feugerolles. Le même hebdomadaire contient le récit fantastique d’un enfant au berceau dévoré par le loup.

    (Écho de la Loire, 2 mars 1845).

     

    1855 – Un nommé Chantelot de Saint-Priest-la-Prugne, réveillé par le bruit d’un combat, voit trois loups à proximité de chez lui ; il en tue un à l’aide d’une fourche.

    (Écho Roannais,  26 juillet 1855)

     

    1858 –  Chasse au loup dans les bois de Sainte-Foy-Saint-Sulpice.

    Deux bêtes sont abattues : un loup et une louve ; cette dernière, expirante, mord à la jambe un stéphanois.

    (Écho Roannais,  4 avril 1858)

     

    1861 – A Cherier, un loup s’introduit dans un vieux moulin. Ses hurlements attirent le meunier et son commis. Le premier, saisi par la peur, tombe avec sa lanterne. Le loup en déguerpissant, bouscule le commis qui est emporté sur le dos de l’animal  comme un sac de son ! Un vrai sujet de fable !

    (Écho Roannais, 5 mai  1861)

     

    1864 – A Cherier encore, un fermier et sa femme occupés dans un taillis assistent au combat de leur chien avec un loup. Celui-ci abattu pesait 36 kg. Sa dépouille, promenée de maison en maison rapporta trente à quarante francs en œufs ou en beurre ! Sa peau fut vendue 15 F.

    (Nouvel Écho de la Loire, 24 décembre 1864).

     

    1877 – Exploit d’un agriculteur de Noailly qui tue d’un coup de fusil une louve pleine. Il a promené son trophée dans les rues de Roanne.

    (Journal de Roanne, 19 août 1877)

     

    1880 – Une courageuse jeune fille du village de Fouet, à Saint-Rirand, poursuit  un loup qui venait de lui voler un agneau et le frappe à la tête avec son sabot sans pouvoir l’empêcher de fuir avec sa proie. (Journal de Roanne, 19 août 1877)

    (Journal de Roanne, 23 mai 1880)

     

    1880 – On dit que les loups sont nombreux cette année dans la forêt de Lespinasse. L’un des plus célèbres braconniers du pays, à l’affût aux perdrix, vient d’abattre une louve, le dimanche, à la sortie de la messe, il était fier de montrer l’animal aux habitants de Saint-Gemain-Lespinasse, Saint-Forgeux et Ambierle.

    (Journal de Roanne, 12 septembre 1880)

     

    1881 – Un propriétaire de Saint-Priest-la-Prugne, aidé par son domestique, capture dans les Bois Noirs une nichée de 5 louveteaux. L’un deux, recueilli et soigné, est destiné plus tard au croisement avec une chienne ( !). Un autre doit devenir gardien de troupeau ( !). Un troisième est mort. Enfin les deux derniers emmenés dans le Puy-de-Dôme chez un louvetier devront faire la guerre à leurs semblables.

    (Journal de Roanne, 19 juin  1881)

     

    1883 – Un journalier de Saint-Forgeux-Lespinasse abat une louve qui cherchait à dévorer son chien dans la cours de son habitation à Biossy.

    (Journal de Roanne, 4 mars 1883)

     

    1888 – Des loups égorgent un troupeau de moutons à Saint-Priest-la-Prugne et reviennent chercher la nuit suivante, deux de leurs victimes non enlevées.

    (Journal de Roanne, 20 septembre 1888)

     

    1889 – On reparle des loups dans le canton de Saint-Just-en-Chevalet. La température rigoureuse est jugée responsable de leur apparition et de leurs audaces.

    (Journal de Roanne, 3 mars 1889)

     

    1893 – Deux ramasseurs d’airelles découvrent 5 louveteaux vers le Gué de la Chaux. Poursuivis par la louve, ils ne peuvent en emporter qu’un seul mis « en nourrice » au hameau de la Verrerie.

    (Journal de Roanne, 27 et 30 juillet 1893)

     

    1895 – La neige fait sortir les loups de leurs repères et un spécimen de belle taille est abattu dans la partie haute de la commune de Villemontais, par un fermier de la Grange Bouttet

    (Journal de Roanne, 17 janvier 1895)

     

    1895 – A Saint-Romain-d’Urfé, un loup s’introduit en plein jour dans une ferme du hameau des Barges et emporte une brebis.

    La battue se solde par un échec.

    (Journal de Roanne, 3 février 1895)

     

    1897 – Battue sans résultat en Madeleine malgré la présence de 25 tireurs et de 30 rabatteurs.

    (Journal de Roanne, 19 septembre 1897)

     

    1898 – Romain Brat, cultivateur d’Oblette, vient de tuer un loup de 33 kg. L’animal est exposé à la mairie de Saint-Just-en-Chevalet.

    (Journal de Roanne, 7 mars 1898)

     

    1901 – On signale des apparitions de loups dans les bois d’Urfé.

                (Journal de Roanne, 24 février 1901) 

     

    Des loups sont abattus en d’autres régions de France jusqu’au milieu du XX° siècle. Bien entendu, il s’agit de faits de plus en plus rares.

    Les dernières mentions de la presse roannaise relèvent déjà de la curiosité.

     

    Études et documents : LOUP QUI ES-TU

    Centre de Recherches Ethnologiques du Musée Alice Taverne à Ambierle (Loire) 1986

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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