• On ne badine pas avec le blasphème !!! (3° partie et fin)

     

    On ne badine pas avec le blasphème !!! (3° partie et fin)

     

    Aux blasphèmes que l’homme du peuple de tous les pays profère (plutôt encore par grossièreté que par impiété voulue), les théologiens rattachent les critiques, les protestations des hommes du monde qui, pour s’exprimer en des termes choisis et même littéraire, n’en prononcent pas moins des paroles ayant un caractère injurieux et blasphématoire.

     

    L’inégale répartition des biens ici-bas ; la disproportion indéniable qui se rencontrent souvent, entre les vertus des hommes et leur félicité terrestre ou in- versement, servent surtout de prétexte opportun à ces blâmes qui s’adressent à la Justice divine.

     

    Les arguments employés en pareil cas sont si spécieux, qu’ils méritent une réfutation à part.

    Un seul exemple suffira à montrer combien sont téméraires, ceux qui osent s’ériger en juges clairvoyants des mérites ou des fautes d’autrui.

     

    Mettons en parallèle : d’une part saint Vincent de Paul consacrant sa vie entière à faire le bien, mais commettant cependant, comme tout homme, des peccadilles ; et d’autre part un grand coupable quelconque, faisant de temps à autre quelque bonne action.

    Si comme l’enseigne la théologie, l’homme vertueux doit jouir après cette vie d’un bonheur sans fin ; s’il le coupable impénitent doit encourir un châtiment éternel, faut-il donc s’étonner que, dès ce monde et en ce monde, le juste expie ses fautes dans la douleur ; et qu’au contraire l’homme coupable reçoive, au moins, ici-bas, la récompense de ses rares bienfaits ?

    Voilà pourquoi on rencontre fréquemment de saintes gens qui se sanctifient par les épreuves terrestres héroïquement supportées ; alors qu’à côté d’eux des hommes injustes jouissent de la fortune et des honneurs, comme paiement actuel de quelques bonnes actions isolées.

     

    L’injustice n’est donc qu’apparente.

     

    Ceci est si vrai, que, n’était l’épuration mystérieuse du Purgatoire, on pourrait, dès cette vie ce semble, préjuger des destinées éternelles de chacun.

     

    Force est même de reconnaître que l’Équité s’accorde avec cette étonnante contradiction entre les mérites de certains hommes, et le sort qui leur est imparti sur cette terre ; un verre d’eau donné aux pauvres méritant récompense, et toute faute d’autre part voulant une expiation.

    Autrement dit : grâce à l’appoint de souffrance ou de bonheur que chacun de nous fournit en cette vie, il se peut donc que l’âme humaine, au moment de la grande aventure de la mort, selon la belle expression de Bossuet, se trouve parfois avoir entièrement réglé ses comptes avec la justice d’En Haut, qui les acquittera par une éternité.

     

    Les hommes à courte vue jugent en effet les choses de la vie, comme si tout finissait au tombeau ! De là les révoltes de leur esprit, quand, selon les cas, des prospérités ou des afflictions déconcertent les prévisions humaines.

     

    En résumé : à ceux qui blasphèment et s’indignent parce qu’ils se sentent impuissants à comprendre les desseins mystérieux du Ciel et l’efficacité des ouvres méritoires, il convient de rappeler le mot de Jean-Jacques Rousseau, donnant aux impies de tous les âges cette magistrale leçon : « Tenez votre âme en état de ne pas craindre qu’il y ait une Justice divine ; et, alors, loin de la blasphémer, vous n’en douterez jamais. »

     

    La réponse à l’objection a été donnée, sous une autre forme des plus heureuse, par un dramaturge (Alexandre Dumas fils : L’Étrangère) qui fut un profond philosophe à ses heures : « Vous ne voyez pas que le Ciel soit juste, dites-vous ?...C’est peut-être parce que vous ne regardez p       as assez longtemps. »

     

    Cette vérité devient souvent manifeste quand notre jugement peut porter sur le sort de plusieurs générations successives : alors la raison de bien des épisodes ou des particularités dont nous ne soupçonnons même pas la portée ni le sens, se révèle à nous peu à peu, et nous nous expliquons enfin certains faits, qu’hier encore nous jugions inintelligibles ou contradictoires.

     

    L’extraordinaire prétention des hommes en révolte contre la Providence est que tous les événements contemporains de leur vie, doivent être complétés, terminés, liquidés avant qu’ils ne descendent au tombeau : comme si en vérité rien ne les avait précédés ici-bas ! Comme si rien ne pouvait ni ne devait leur survivre ! Comme si enfin, avant de disparaître du monde, nous avions le droit de demander des comptes à Dieu et d’exiger l’explication claire, intégrale et dernière de toutes choses !

     

                                     Fernand Nicolaÿ (Histoire des Croyances)


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