• L’ART DE PUNIR LE MONDE (première partie)

    blog 2011 chaise a punir
     

    En décembre 2010, un  colloque international de l’Université de Genève (faculté des lettres, Département d’histoire générale) se déroule sous le titre :

     

    « Bois, fer, papiers et bracelets de Justice »

    « Histoire matérielle du droit de punir : Hier et aujourd’hui »

     

    La description des tortures imposées est ahurissante ; quand on pense aux revendications des actuels détenus de nos prisons.

    Pour vous mettre « dans l’ambiance » voici quelques lignes écrites en 1980 par Henri Frossard de l’Académie des Provinces Françaises sur :

     

    L’ART DE PUNIR LE MONDE

    (Première partie)

     

    En lisant les Mémoires de la Grande Catherine, Victor Hugo a découvert un passage encore plus surprenant que les autres :

     

    « Quand le czar ou la czarine étaient mécontents d’un prince russe ; on faisait accroupir le prince dans la grande antichambre du palais et il restait dans cette posture un nombre de jours déterminés, miaulant par ordre, comme un chat, ou gloussant comme une poule qui couve, et becquetant à terre sa nourriture. » (L’Homme qui rit)

     

    Le même Victor Hugo (il savait tout, cet homme !) toujours dans le domaine de l’incroyable signale un autre style de punition, cette fois dans les Pays-Bas :

     

    «  La loi avait sagement fixé le poids que devait peser un honnête homme. Plus lourd ou plus léger, il était suspect de sorcellerie » Ce n’est plus le lit de Procruste, c’est la balance d’Oudewater, laquelle existe encore, parait-il en servant plus, toutefois qu’à peser des fromages ! ».

     

    « On vous mettait dans un plateau et l’évidence éclatait si vous rompiez l’équilibre : trop lourd, vous étiez pendu, trop léger vous étiez brûlé ! »

     

    Et le festival continue ! A Montbéliard, mes pauvres amis ce n’est plus Pétersbourg, ce n’est pas Oudewater, c’est ici !) à Montbéliard, les braconniers étaient tout simplement mis à la question pour dénoncer leurs complices ! Au récidiviste, on fixait un collier appelé « corne de cerf », collier qu’il devait garder à perpétuité, « afin que les larrons de venaison puissent être reconnus devant les autres ». Si le condamné se permettait d’ôter ce collier (qu’on a tout lieu de supposer assez lourd), on n’y allait pas par quatre chemins «  immédiatement et sans rémission, il aurait perdu la tête ! ».

     

    Il y a littéralement, d’ailleurs, de quoi perdre la tête, à toutes ces évocations !

     

     

    On prétend qu’il existe encore dans certains musées d’Angleterre (voire dans certaines églises) des spécimens de fauteuils imprévus. La plupart sont en chêne, quelques-uns sont en fer. Ils sont complétés par un système compliqué de cerclage, car ce ne sont pas d’honnêtes fauteuils : il s’agit d’instrument de torture (ducking stool).

     

    Victor Hugo (encore lui !) dans l’Homme qui rit (il n’y a vraiment pas de quoi !) prétend que l’on doit écrire Cucking stool, « expression composée du mot français coquine et du mot allemand stuhl, pour signifier Chaise de p… ». Et l’édition de l’Homme qui rit, de 1886, donne un dessin – signé Vierge, ce qui prouve qu’il y a de tout dans le monde ! – d’un de ces instruments en action.

     

    On les avait construits pour une destination bien précise : calmer les femmes acariâtres, atténuer la virulence des harpies vindicatives. Et si l’on juge d’après la quantité de sièges qui restent encore, les mégères non apprivoisées devaient, en ce temps-là, être légions.

     

    Le mode d’emploi était simple : la femme était assujettie au fauteuil et celui-ci soulevé dans les airs par un système de balancier. On plongeait ensuite le fauteuil et la malheureuse dans l’eau d’une rivière ou d’un étang. La rivière, c’était mieux : on adaptait ferme l’affaire sur un bateau qui traversait alors la ville. Ainsi, de temps à autre, au fil du courant, suivant la décision du juge, ou la fantaisie du bourreau, ou la demande de la foule accourue, hop ! on infligeait une immersion.

     

    On ne précis pas si cette thérapeutique grossière était efficace mais on conserve le souvenir de pauvres femmes qui moururent de honte…et de chocs nerveux.

     

    Evidemment, c’était en Angleterre, dans le secteur d’Ipswich et dans celui de Fordwich dont, déjà, rien que les noms sentent la sauvagerie ! C’était dans un univers super-phallocrate, dans un autrefois aux relents de Moyen-âge.

     

    Hélas nous n’étions pas plus malins. Dans notre Franche-la-Doulce, les maris avaient le droit de battre leurs femmes (Il n’y avait pas que dans Molière !) pourvu que ce soit raisonnablement. Car on savait, bien sur, où commençait le déraisonnable et la déraison.

    Quand une femme, par contre, avait battu son mari, celui-ci était promené par les rues de la ville, monté sur un âne (animal de la dérision) où  il était assis à l’envers, et ce, au milieu des quolibets !


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