• L'Ourgon de Saint-Maurice



     

    L’OURGON DE SAINT-MAURICE<o:p></o:p>

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    Dans la lignée légendaire des Barbe bleue et autre Gilles de Rais, Saint-Maurice-sur-Loire eût, dit-on, son baron dévoyé. Tombée dans les oubliettes de l’histoire, sa perversité n’avait pourtant, rien à envier à celle de ses illustres pairs.<o:p></o:p>

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    Depuis son château et les souterrains qui en descendaient, ses passions troubles, quelque peu dévorantes et sataniques le portaient à s’en prendre…aux gens qui passaient le bac pour traverser la Loire et à la Sainte Vierge de la Chapelle de l’île (Souvenez-vous ! avant le barrage ! L’île ? Celle ou aboutissaient les piles du « pont romain » de Saint-Maurice).<o:p></o:p>

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    Trois fois, il avait tenté de l’enlever. Trois fois, comme en pareil cas le veut une solide tradition, seule et à gué, elle était revenue à sa place. Pour la préserver, les hommes du village, dans l’église du haut, construisirent un jubé où ils installèrent la Bonne Mère. De rage, et de dépit sans doute, notre hobereau abandonna Saint-Maurice pour transporter ses pénates sataniques à Villerest, au Saut du Perron, près du « torrent » du Lourdon, non loin du pont qui l’enjambait « déjà du temps des Romains », sur la voie de passage de Médiolanum à Rodumna.<o:p></o:p>

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    Il y a peu encore, nous dit-on, les gens du pays parlaient indifféremment de la goutte du Lourdon et de l’Ourgon. <o:p></o:p>

    Ce diable d’ogre de « l’île au Diable » ou « Pont du Diable » a laissé trace de ses pérégrinations dans les gorges de la Loire, dans les noms donnés, encore de nos jours aux (Au moins jusqu’à ce qu’ils soient noyés par le barrage) lieux témoins supposés de ces exploits.<o:p></o:p>

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    Sitôt l’île quittée par la Sainte Vierge et le Saut du Perron occupé par l’Ourgon, les bords de la Loire qui y étaient « un petit jardin d’amour » devinrent soudain de sombres paysages de sinistre mémoire, depuis « L’Ourgon y fait son régal des mariniers de Loire ».<o:p></o:p>

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    Selon certains, les mariniers attardés à boire, arrivée à la nuit tombée trop tard pour prendre la barque du passeur, en trouvaient une sur la berge, opportunément disponible, mystérieusement conduite par un batelier invisible : « le pontonnier de nuit ». Arrivé sur l’autre rive, celui-ci prenait les traits de l’Orgon, « grand comme un mât de bateau, vêtu du costume des mariniers de Saint-Rambert : grand chapeau, culotte de velours, ceinture rouge ». L’infortuné marinier devait payer de son âme le prix du passage, après un dernier dîner orgiaque et infernal dont les bons chrétiens de Saint-Maurice pouvaient entendre la nuit, le bruit des chansons et des verres ».<o:p></o:p>

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    Pour d’autres, les mariniers faisaient une mauvaise rencontre, qui les perdait. Sur le chemin de retour de Roanne à Balbigny, un étrange compagnon de route, vêtu comme un seigneur, les invitait chez lui à trinquer, puis à dîner. Les choses tournaient mal. L’homme aux bonnes manières, au milieu du festin, se transformait en un monstre dévorateur.<o:p></o:p>

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    Tous ceux, ce point fait l’unanimité, qui « sont allés dîner chez l’Ourgon » n’en sont point revenus : faute d’avoir fait, quand il en était encore temps, le signe de croix ou le vœu à Notre-Dame de Vernay qui auraient pu les sauver.<o:p></o:p>

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    Aller dîner chez le « vilain » ou le « mauvais » disait-on aussi. Ripailles de vin, de mets et de filles ; servantes accortes aux cheveux blonds ou créatures « belles comme les sept péchés capitaux », ou propres filles de l’Ourgon aux corps de sirène, d’une Loire masculine, féminine, ambivalente, semblables à celles des bords de la Garonne, qui par leur chant, attiraient les plus jeunes bateliers ou à celles des bords de Rhin, fleuve masculin et misogyne, dont le Lorelei, en peignant ses longs cheveux d’or, fascinaient les mariniers dont les barques venaient se fracasser contre son cœur de roc.<o:p></o:p>

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    Descendants actuels des marin d’eau douce d’autrefois qui, aujourd’hui, sur vos « voiles légères » vous aventurez dans les vents tournants du Saut du Perron, écoutez le conseil que vous chantaient peut être  vos mères : « Prenez garde au flots bleus ».<o:p></o:p>

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    Quant à toi, l’Ourgon, les eaux du barrage t’ont-elles définitivement englouties, toi et des filles, au fond du « mauvais pas » ? Que diable ! Tudieu ! N’y serais-tu pas plutôt désormais, le gardien du trésor et de la mémoire de la Loire : fleuve d’or…et de sable !<o:p></o:p>

                                               Paul Court <o:p></o:p>

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    Sources :<o:p></o:p>

    ·        L’Ourgon de Saint-Maurice : Noëllas, légendes et traditions Foreziennes. Roanne 1865.<o:p></o:p>

    ·        Légende de l’Ourgon : Combe, Le Pays Roannais Comtes et Légendes, Saint-Etienne 1962<o:p></o:p>

    ·        La mémoire des Fleuves de France : Philippe Barrier Plon<o:p></o:p>

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