• LA BUCHE DE NOEL

     

     

    LA BUCHE DE NOEL

     

    L’usage de la Bûche de Noël, qui se rencontre partout chez les chrétiens, quelque que soit l’époque ou la région.

     

    Sans doute, célébrer ce symbole du foyer, au jour de froidure où se place la fête de la Nativité, mettre en honneur le morceau de bois sec et résineux qui promet de chaud rayonnements aux membres raidis sous la bise, est une idée si naturelle, que sa généralité ne saurait étonner en rien. Néanmoins, à côté du fait constaté, il est utile de rechercher les origines coutumières ou légales de cette pratique, qui entre toute, nous initie aux mœurs du moyen âge.

     

    De nos jours, vers la fin de décembre, on voit aux vitrines des confiseurs et des marchands de jouets, des buchettes en carton, en sucre, en plâtre, en chocolat…Mais à l’époque féodale, la bûche était positivement une redevance, autrement dit un impôt en nature, que le vassal payait au seigneur.

     

    Les redevances étaient acquittées en produits déterminés, correspondant aux époques choisies : ainsi à Pâques, la prestation consistait en paniers d’œufs ou en agneaux ; à l’Assomption, le vassal donnait du blé ; à la Toussaint, du vin ou de l’huile ; à Noël, du bois.

     

    Ces impôts féodaux variaient aussi d’objets selon les provinces : le Picard payait en grain ; le Bourguignon en vin ; l’Auvergnat en bétail, le Normand en pommes…Les plus pauvres ceux qui n’avaient que leur bras pour toute fortune, se libéraient par un travail personnel, tel que le fauchage, le labour, le charriage, etc.

     

    Il ne faudrait pas croire que ces usages aient complètement disparu. Maintes fois encore, dans des baux relatifs aux fermes, ne trouve-t-on pas inscrites des clauses comme celles-ci : « Le preneur, eu outre du prix stipulé, apportera deux dindons à la Saint-Jean, où six canards à la Saint-Martin, ou un cent d’œufs à Pâques… »

     

    Il semble de prime abord, que l’impôt de quelques bûches était en fait, une charge insignifiante. Moins qu’on le croit ! Car de même qu’il y a « fagots et fagots », il y aussi bûches et bûches. Il suffit pour s’en convaincre de se rappeler l’énorme dimension des cheminées d’autrefois, dont le manteau était vaste au point de contenir facilement sous son abri enfumé une famille entière : parents, enfants, serviteurs, sans compter les lévriers fidèles, et les chats frileux. Ce n’est pas moins qu’une énorme section d’arbre que représentait alors chacune des bûches destinées aux foyers de nos pères.

     

    Avant de quitter le logis pour se rendre à l’église, afin d’y assister à l’office divin et à la représentation du Mystère, on allumait la bûche nouvelle, entourée des tisons provenant de celle de l’année précédente, et conservés à cet effet ; ce soin était réservé au plus jeune enfant de la maison, qui répandait un peu de vin sur la bûche, en récitant une prière que lui soufflait à l’oreille le chef de famille, le noble châtelain, le pieux aumônier ou la « gente damoiselle de céans ».

     

    Dans sa touchante invocation, le petit officiant demandait à Dieu une année clémente pour les pauvres, une récolte abondante pour tous, et la bénédiction d’E-Haut pour sa famille.

    Avec le plus grand soin on disposait l’âtre, car si la bûche s’éteignait pendant l’office, on voyait là un présage de malheur.

     

    Sans doute, les redevances en nature présentaient un caractère d’impôt ; mais elles avaient aussi pour but de conserver par une manifestation extérieure, non pas seulement les droits des seigneurs, mais aussi les preuves de la libération des débiteurs, contrepartie dont on ne parle jamais pour ainsi dire, et sur laquelle précisément il y a lieu d’insister.

     

    Au moyen âge les conventions étaient ordinairement verbales, on devait craindre qu’au bout d’un certain temps les conditions du contrat ne fussent oubliées par négligence, ou même méconnue par déloyauté. C’est donc pour éviter des contestations, entretenir le droit et maintenir les traditions, que l’on rencontre, à l’époque féodale, quantité de pratiques ou de démarches, dans lesquelles l’observateur superficiel n’aperçoit qu’un jeu puéril, une sotte vexation ou une particularité inexplicable.

     

    Donnons un exemple typique qui expliquera notre pensée.

    Les vieux auteurs et les Coutumiers nous apprennent que dans plusieurs régions, en la fête de la Noël, certains vassaux venaient en procession offrir à leur maître et seigneur, non pas une grosse charretée de bûches, mais un briborion (diminutif de brin ou bribe ; dans l’ancien français briborion signifiait également courte prière.) de bois, si petit qu’il pouvait tenir dans le creux de la main…Était-ce une mystification, ou au contraire une chose sérieuse ?

    Voici l’explication.

    Supposons un seigneur voulant dispenser ses vassaux de certain tribut en blé, bûches (le droit de bûche était même reconnu en faveur des Trésoriers de France, sur les officiers placé sous leurs ordres) ou bétail…Au jour choisi, il annonçait solennellement cette remise de dette… Mais, pensaient les débiteurs, la belle humeur du maître persévérera-t-elle dans les années suivantes ? Une déception quelconque, un retour égoïste ne va-t-il pas rendre caduc cet abandon spontané... ? Ou bien encore, un autre seigneur au lit de mort, les exemples en sont nombreux, faisait à ses « hommes » une remise de ce genre… Les bénéficiaires ne pouvaient-il pas se demander, si les héritiers du défunt respecteraient dans l’avenir le bienfait octroyé.

     

    Et alors se comprend à merveille, au jour anniversaire de la libération, certains tenanciers, non moins rusés peut-être que reconnaissants, rappelaient, dans une cérémonie opportune (qui n’a de ridicule que l’apparence) que désormais les droits du seigneur étaient abolis et l’obligation corrélative éteinte ; et en conséquence, pour qu’il fut bien notoire qu’ils ne devaient plus rien, ils ne manquaient pas, tout en fêtant le maitre du fief, d’offrir à la date correspondante, seulement un « briborion de bois », un fétu de paille etc.

    Du moins cette interprétation ne semble-t-elle pas douteuse quand on voit les débiteurs se livrer à de grandes réjouissances à l’occasion de tels ou tels de ces anniversaires.

     

    Dira-ton que l’absence de toute démarche eût affirmé plus encore la dispense ? Non pas ! Car, à défaut d’aucun signe commémoratif, les seigneurs auraient pu prétendre un jour ou l’autre ressusciter leur droit dans sa rigueur originaire, puisque les redevanciers s’engageaient habituellement, « eux et leurs descendants, à toujours ».

     

                                                         Histoire des Croyances


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