• Un chef de gare d’Aix-les-Bains fut l’ami de la Reine Victoria D’Angleterre

     

    Un chef de gare d’Aix-les-Bains fut l’ami de la reine Victoria

    D’Angleterre

     

    Au moment du couronnement de la jeune Reine d’Angleterre, je me permets de narrer l’anecdote suivante, telle que me l’ont contée de vieux cheminots, dont faisait partie mon père, tous disparus depuis longtemps et qui en furent les témoins.

     

    Au temps où la Reine Victoria fréquentait Aix-les-Bains, la ville était loin de ressembler à ce qu’elle est de nos jours.

     

    La gare était petite à côté de ce qu’elle est actuellement et des troupeaux de ruminants paissaient tranquillement dans les près, là où se trouvent maintenant les avenues de la gare, Wilson, Marie etc.… bordées de grands hôtels, magasin, cinéma et autres édifices.

     

    Un jour, la Reine Victoria, accompagnée de deux dames d’honneur se promenait dans la campagne, quand elle fut surprise par un orage, la gare était proche, elle s’y réfugia et alla frapper à la porte du bureau du chef de gare qui reçut sa Majesté, le plus simplement du monde, la gratifiant du seul nom de « madame », la fit asseoir sur la seule chaise qu’il avait de disponible et alla ensuite dans le bureau voisin chercher deux autres sièges pour les dames de compagnie de la Reine.

     

    La Reine s’excusa de le déranger tout en lui indiquant le motif de sa visite imprévue ; l’orage battait son plein.

    A l’arrivée de la Reine, le chef de gare fumait la pipe tirant sur une vieille « bouffarde », il demanda à la Reine avec bonhomie, la permission de continuer de fumer si cela ne la gênait pas. Sa majesté lui répondit : « Non, continue », puis ils se mirent à parler comme de vieux amis, la Reine fut charmé de l’attitude, plutôt joviale, du chef de gare, à son égard. Elle offrit une prise à son interlocuteur qui l’accepta, ils prisèrent tous les deux et tous les deux éternuèrent ensemble ; à cette époque on prisait beaucoup.

     

    L’orage était passé depuis longtemps, la conversation continuait toujours entre la Reine et le chef de gare ; enfin la Reine se décida à partir, le chef l’accompagna jusqu’au seuil de sa gare, ils se serrèrent longuement la main, la Reine promit au chef de gare de revenir le voir, ce qu’elle fit souvent par la suite.

     

    L’année suivante, pour l’arrivée du train royal, grand branle-bas, à la gare d’Aix-les-Bains. Surf le quai toutes les personnalités civiles et militaires, dans la cour de la gare, dragon sabre au clair.

    Le train royal était en vue, il entra en gare très lentement, les dispositions étaient prises pour qu’à l’arrêt du train, la portière par laquelle devait descendre la Reine puisse se trouver devant un grand tapis de velours. Minute émouvante, tout le monde tête nue, un seul était resté couvert, le chef de gare ! Un haut fonctionnaire du P.L.M. lui en fit la remarque et le pria d’enlever sa casquette, il répondit : « Le règlement veut que je fasse le salut militaire, je n’ai pas à me découvrir ! »

     

    Le train stoppa sur le signal du chef de gare, la Reine apparut, tout le monde s’inclina bien bas, seul notre chef de gare resta droit en faisant le salut militaire, les hymnes nationaux retentirent, après, avant toutes présentations protocolaires, la Reine apercevant le chef de gare alla droit à lui main tendue, sans se soucier des fleurs qui lui étaient présentées, dit quelques mots au chef de gare, lui donna une poignée de mains et revint aux cérémonies protocolaires. Le haut fonctionnaire du P.L.M. qui représentait le Directeur du réseau et qui, une minute avant, voulut faire découvrir le chef de gare, fut stupéfait de cette scène ainsi que tous les grands personnages présents.

     

    La dernière année  de son séjour à Aix, peu de temps avant sa mort, au cours d’une de ses visites à son ami, le chef de gare, la Reine lui fit part de son intention de lui conférer « l’Ordre de la Jarretière » ; cet ordre est rarement conféré à l’étranger et les dignitaires en sont peu nombreux en Angleterre.

     

    Sur sa demande, la Reine expliqua au chef de gare ce qu’était cet Ordre avec tout le cérémonial de la remise au récipiendaire… La Reine relevait sa robe au-dessus du genou, et le nouveau dignitaire baisait sa jarretière ; à ce passage le chef de gare ouvrit de grands yeux, interrompit la Reine en lui disant : « Oh ! Pour cela, nous sommes trop vieux tous les deux ! »

    La Reine éclata d’un grand rire en lui disant qu’elle le dispensait de la cérémonie.

     

    Peu après, la Reine repartit en Angleterre et mourut avant d’avoir élevé, le chef de gare, dans l’Ordre de la Jarretière ; ce dernier, en apprenant la mort de la Reine, prit sa retraite en emportant le souvenir de celle qui fut « La Grande Victoria ».

     

                                                                                                            Henri Lhuer


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