LA POSTE A L’USINE
Une réalisation P.T.T. appelée à un grand succès.
Après trois mois d’études, M. Bernard Cornut-Gentille, ministre des P.T.T. a donné le « feu vert » à une nouvelle innovation.
22 juillet, 16 h 10, Gennevilliers. Les bâtiments de la General Motors ceignent de leur silhouette élégante la cour de l’usine. La longue file d’ouvriers qui sort en hâte de la « pointeuse » marque aujourd’hui un temps d’arrêt devant une fourgonnette insolite. « Mais, c’est la poste ! » Plusieurs s’approchent se renseignent, « trouvent ça vraiment bien » ; quelques-uns déjà s’avancent tendent une lettre ou un mandat. Et les commentaires marchent bon train avec le groupe, vers la sortie.
Depuis le 20 juillet 1959, une fourgonnette Citroën 1000 kilos aménagée en bureau de poste vient prendre position à l’intérieur de l’usine, vers midi pendant les heures de cantine et le soir à la sortie. L’arrière de la voiture est équipé de deux véritables guichets et les côtés de petites tablettes écritoires, qui se plaquent contre la paroi pendant les déplacements, et d’une boîte aux lettres. Ce bureau mobile permet d’effectuer les opérations postales essentielles ; celles qui encombrent toujours les mêmes guichets aux mêmes heures : émission de mandats, dépôt des lettres et des paquets, vente de timbres-poste, Caisse nationale d’épargne (ouverture de comptes, versements, remboursements).Cela permet de satisfaire déjà la plupart des demandes et d’éviter ainsi aux ouvriers bien des dérangements. Car tels ou tels d’entre eux qui envisageaient à contrecœur de passer au bureau le plus proche (2 km) avant de rejoindre leur famille ou qui devez se résoudre à perdre une heure de travail pour expédier un mandat trouveront désormais sur place tout ce qu’il leur faut. Quant aux épouses, elles pourront se réjouir maintenant de voir entrer au foyer une paie déjà entamée : C’est que la différence aura été versée à la Caisse nationale d’épargne.
Et preuve de l’intérêt suscité, des suggestions affluent déjà : les ouvriers italiens, nombreux aux aciéries de Gennevilliers, désireraient pouvoir utiliser le bureau mobile pour envoyer de l’argent chez eux. Ne serait-il pas possible également d’y obtenir des paiements « à vue » ? Ne pourrait-on pas au début tout du moins, indiquer à l’avance les heures de passage de la voiture en joignant par exemple un prospectus aux bulletins de paie ? Bref, autant de questions, autant de problèmes qui ne pourront être résolus qu’à la longue lorsque le nouveau service sera mieux rodé.
L’accueil des chefs d’entreprise, du chef du personnel en particulier, est partout remarquable d’empressement. Dans toutes les usines visitées, l’initiative des P.T.T. a été précédée d’une large publicité. C’est un appoint de valeur car l’ébauche d’un programme, les contacts avec les directions, l’étude des horaires et des lieux de stationnement, l’établissement d’un « circuit » ne constituent pas une affaire de tout repos. Et il reste que, malgré l’étalement des horaires de sortie des usine (afin de permettre aux métros et autobus d’absorber la foule des heures de pointe), le bureau de poste mobile, ne dispose que de très peu de temps pour se déplacer d’une usine à l’autre, y ouvrir ses guichets, faire ses comptes et rentrer pour 19 heures à son bureau d’attache.
Mais les vœux de réussite des chefs du personnel dans les usines visitées, les exclamations admiratives des ouvriers se pressant aux guichets constituent déjà pour les P.T.T. un encouragement précieux. Et l’on imagine, en cette période de vacances, quelque « métallo » parisien se promenant sur la Canebière annoncer d’un air condescendant à un Marseillais médusé : « A Paris, mon vieux, ce sont les bureaux de poste qui se déplacent pour venir te servir ».
DU BUREAU DE POSTE MOBILE … AU BUREAU DE POSTE FIXE.
Le premier circuit de poste mobile inauguré le 20 juillet permet de desservir 11 usines de Courbevoie, Gennevilliers et Saint-Denis, soit environ 20 000 ouvriers. Si les résultats de cette expérience sont satisfaisants, le système sera étendu à d’autres secteurs de la banlieue parisienne ainsi qu’aux banlieues industrielles des grandes villes de province. Il est même envisagé d’installer, à demeure dans les usines très importantes des bureaux de poste auxiliaires ouvert pratiquement à toutes les opérations postales.
La Poste et les télécommunications (1952)
Ce service perdura pendant plusieurs années avant de s’éteindre petit à petit.
Ils existaient encore des « tubs » jaunes de la poste dans le milieu des années 1960