VARIETE RETROSPECTIVE
Charger un Roannais d’adoption de faire un tour rétrospectif sur l’actuel Palais des Fêtes, voilà qui paraîtrait d’un illogisme flagrant si le Roannais en question, fort heureusement pour lui dans ses nombreuses relations de vieux et authentiques Roannais, ces derniers garantis d’origine.
C’est donc auprès de ces aimables personnes, chez qui le chapitre « souvenirs » a fait place au chapitre « Projets » qu’il est allé se documenter.
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Un des premiers occupants de l’ancien immeuble du cours de la République fut Ferlay, imprimeur, qui y transporta son matériel rue Bourgneuf où il était installé primitivement. Ferlay fut et demeure un nom dans l’histoire locale ; polémiste ardent, critique spirituel, poète à ses heures, il composa une revue locale qui remporta à l’époque un énorme succès et dans laquelle sa verve brillante et son esprit satirique étincellent à toutes les pages et dans tous les couplets.
Pendant la guerre de 1870, c’est dans son imprimerie que se composait et s’éditant la « Gazette Populaire ».
Toujours dans la même profession, Miquel succéda à Ferlay. A la disparition de l’imprimerie Miquel, et lors de l’acquisition de l’immeuble par M. Depaux père, les Enfants de la Loire installèrent leur salle de gymnastique concurremment avec un atelier de mécanique où plusieurs artisans se succédèrent. Enfin, M. Depaux créa le music-hall des Variétés et la salle ainsi consacrée au culte de Thespis et de Terpsichore conserva cette destination jusqu’à l’incendie de Juillet 1931.
Les spectacles, à l’époque, étaient fort divers et nombre de Roannais se rappellent avoir applaudi aux exploits de Paul Pons et de Raoul Boucher.
Dans un autre ordre d’idée, on vit encore aux Variétés, mais en luttes purement oratoires, les vedettes de tout premier plan, tel que Waldeck-Rousseau, Jaurès, etc.
Des revues de qualité inégale s’y succédèrent durant les différentes gestions.
De nombreuses associations roannaises donnèrent fréquemment des bals.
Pour se rendre un compte exact du magnifique effort réalisé actuellement, il faut se reporter à l’état de l’immeuble avant sa disparition.
Ce dernier comportait une salle assez vaste. Toutefois laissés sans réparations depuis fort longtemps, le plafond lépreux menaçait ruine, le parquet cédait aimablement sous la pression du soulier, et l’installation générale demeurait encore très rudimentaire.
Une buvette faon couloir du métro occupait les dessous d’une voûte, laquelle lorsque la clientèle affluait, devenait inhabitable en raison de l’épais nuage de fumée émanant des cigarettes, qui ne trouvant pas d’issue pour effectuer sa sortie, s’obstinait à ne pas vouloir disparaître.
Quoi qu’il en soit, le Palais des Fêtes actuel est une pure merveille. Rien n’a été oublié et je me demande ce que l’on pourrait ajouter, soit en confort, soit en luxe, à ce qui a été fait.
Du reste je ne m’étendrai pas davantage sur la nouvelle construction, je laisse au public roannais, au bon sens si robuste, le soin de juger par lui-même et d’apprécier comme il convient. Je me bornerai à dire que cet ensemble grandiose et élégant à la fois ne pouvait être conçu que par un homme de métier, un homme de théâtre : j’ai parlé de Fossoul, qui a su s’entourer de collaborateurs tels que M. Jean Gaillard, architecte et d’artisans dévoués à qui il sied de décerner des éloges.
Après avoir été le fondateur avec M. Auguste Depaux, Fossoul a rempli la tâche d’Administrateur et de Directeur technique avec une patience et une constance admirables.
C’est maintenant pour lui le rôle obscur de Directeur artistique, rôle ingrat qui donne d’immenses déceptions mais qui procure également à un artiste des jouissances et des satisfactions de même grandeur.
Léo de Marsan