Facteurs à bicyclette (1° partie)
A BICYCLETTE
Pour les facteurs l’invention de la bicyclette a son importance dans la distribution du courrier…
Le vélocipède à pédales, construit par Pierre Michaux et son Fils Ernest en 1861, connaît très vite une grande vogue dans les milieux aisés et élégants où sévit la « vélocipédomie »
Signe du temps, son engouement devient général. Le vélocipède est partout en 1869, à la ville comme à la campagne. On pense qu’il va supprimer les chevaux. Il cède sa place à la bicyclette à partir de 1886 (1).
En septembre 1890, une compagnie privée distribue dans Paris et sa banlieue, par des agents « bicycliste », puis sur triporteur, les colis postaux, service concédé par l »administration des Postes et Télégraphes qui ne montre pas u l’exemple dans la rapidité d’emploi de la bicyclette, très vite passée dans les mœurs des maisons de commerce.
Il y a l’habituelle routine administrative réfractaire à tous changements que dénonce une publication professionnelle, mais aussi le fait que l’État ne fournit pas les vélos.
Les postiers prennent les devants. Ils se munissent de bicyclettes à leur propre initiative. Malgré une étude générale lancée en 1894 pour l’emploi du « vélocipède » (2) l’administration n’a pas de politique en la matière. Alors l’adoption officielle du véhicule ne se fait qu’avec des demi-mesures et des restrictions ridicules.
La campagne en première ligne
Les facteurs de la campagne se déplacent très tôt à vélocipède à pédales à deux ou trois roues, si l’on se réfère à une gravure parue en 1868 et à un almanach postal de la même époque.
Ils continuent avec la bicyclette. Cela se conçoit si l’on considère la longueur et la durée de leurs tournées quotidiennes : 30 km et 8 heures en moyenne. Ils sont encouragés dans cette voie ; en son article 10, la loi de finances du 28 avril 1893 exonère de taxe les agents qui utilisent le vélocipède pour le service (3).
Cependant, même si elle ne fournit pas le véhicule (et a fortiori ne se charge ni de son entretien ni de réparations) l’administration conserve un droit de regard sur son utilisation : « Les machines devront être conforme au modèle actuellement en vigueur, le plus répandu qui est la bicyclette et être construit suivant les règles de l’art. Les facteurs ne se serviront de préférence du caoutchouc creux ou du caoutchouc pneumatique » De plus, le receveur s’assure si les intéressés savent rouler à bicyclette et sont en état de circuler dans les rues, sans danger, à une vitesse normale (une habitude qui perdurera pendant très longtemps puisque au milieu des années 1985, n’importe quel facteur devant conduire un cyclomoteur pour l’administration devait « passer » un examen de conduite surveillé par un responsable en voiture).
Le tricycle qui est un type encombrant, et le bicycle, qui présente un danger dans son maniement, sont admis sous réserve, à titre provisoire (1895). Enfin, différentes circulaires réglementent les conditions d’emploi de la bicyclette et citent les sanctions pour négligence ou faute grave de conduite.
Pour justifier son attitude, l’Administration avance que les disponibilités budgétaires ne l’autorisent pas à acheter quelques 20 000 vélos.
Et le pauvre facteur (et Dieu sait combien il est pauvre avec une rémunération de misère) peut-il s’offrir une telle machine qui coute 320 francs ? Il gagne de 400 à 860 francs par an, desquels il faut déduire la retenue de 5% pour la caisse de retraite (4).
Aussi signale-t-on une commune dont les habitants cotisent pour payer des bicyclettes à leurs facteurs. Même les notables délient leur bourse…
Il n’en demeure pas moins que le facteur peut bénéficier parfois d’une indemnité pour surcroît de parcours, c'est-à-dire pour une tournée, supérieure au maximum de 32 km à pied : en 1899, 93 agents sont concernés ; rappelons que le facteur travaille 7 jours sur 7 toute l’année.
(1) Le Vélocipède sans pédales fixées sur la roue avant « la draisienne » date de 1818. Le vélocipède à pédales à deux roues est aussi appelé bicycle dont le « Grand bi » est l’aberration. Il existe à trois et quatre roues.
La bicyclette avec pédalier et chaîne de transmission du mouvement à la roue arrière serait une invention non suivie d’effet, du Français A. Guilmet (1868). Le premier brevet pour une bicyclette, l’ancêtre de l’actuelle a été déposé le 30 septembre 1879 par l’Anglais Lawson. Le vélocipède à pédales à trois roues se mue en tricycle.
(2) On dit en 1890 : vélocipède, vélo, bicyclette, bécane. En attendant que son nom s’impose. La bicyclette prend celui de vélocipède, à tort. Il nous est resté le vélo.
(3) L’État perçoit un impôt sur les bicyclettes.
(4)Contrairement au facteur de ville, le facteur rural ou local n’a pas de salaire fixe. Il perçoit 7, 25 centimes par kilomètre parcouru par jour. Plus la tournée est longue plus il gagne ! Le traitement est fixe, mis en pratique en 1895, ne sera généralisé qu’a partir de 1899.