• SOIR D'OCTOBRE  1
     

    SOIR  D’OCTOBRE

     

    Soir d’octobre ! Le vol attardé des palombes

    Tourne dans le ciel mauve au ras de chênes bleus ;

    Le village dissout ses pignons anguleux

    Autour du froid clocher qui veille sur les tombes.

     

    Un chariot qui crie emporte, vacillant,

    La dépouille des bois sur la route déserte,

    Et, dans le vide obscur de la campagne inerte,

    Un paysan lointain chante un vieil air dolent.

     

    La romance se perd, ineffablement triste,

    Derrière le brouillard qui monte des guérets,

    Laissant de longs échos et de vastes regrets

    Dans l’âme où la lueur de l’enfance persiste.

     

    Aux vergers, par instants, la chute d’un fruit mûr

    Retentit : le retour d’une génisse tinte ;

    Comme la nue en feu, la rose s’est éteinte.

    Et lasse, au vent furtif, s’effeuille sur le mur.

     

    L’heure est douce et, pourtant, de l’amertume traîne

    Dans l’air où les celliers épandent leur odeur,

    Car le fruit ne vaut pas l’ivresse de la fleur.

    La tige n’atteint point au désir de la graine.

     

     

    Les songes d’un passé vibrant d’illusions

    Et les vaines ardeurs d’une jeunesse veuve,

    Ainsi que les fanaux aux berges d’un grand fleuve

    Projettent dans le cœur de vagues visions.

     

    La barre du couchant, déjà, s’est embrunie

    Et la nuit douloureuse a voilé les hameaux.

    Seule, dans le silence, à travers les rameaux

    Une cloche lointaine annonce une agonie.

     

                         Joseph POMIE


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