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L’ATTAQUE CONTRE LES AUTRICHIENS À SAINT-SYMPHORIEN-DE-LAY EN 1814<o:p></o:p>
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(D’après le livre de M. Abel Chorgnon)<o:p></o:p>
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Les Hussards cantonné à St-Symphorien vinrent à plusieurs reprises en vue de Roanne comme pour en braver les défenseurs. Exaspérés de ces apparitions, des habitants, en majorité des marinier, résolurent d’aller affronter les Autrichiens dans leur propre cantonnement à St-Symphorien, où on croyait qu’il n’y avait qu’un seul escadron ; 130 hommes environ, sans compter les vedettes et cavaliers envoyés en reconnaissance.<o:p></o:p>
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Il fut décidé que l’on s’y rendrait par les chemins de traverse, et que l’on partirait assez tôt pour surprendre l’ennemi dans une attaque de nuit.<o:p></o:p>
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L’exécution en fut fixée à la nuit du samedi au dimanche de la Passion. Le rassemblement devait avoir lieu au bout du Coteau, à minuit. Nous nous dirigeâmes vers Pradines ; arrivés au His, près de Régny, le chemin était si défoncé et si boueux, que tout à coup, je fis un faux pas et tombai. La pierre de mon fusil me fit au genou une blessure, d’où le sang coula abondamment. Deux de mes camarades m’aidèrent à marcher, l’espace d’un kilomètre.<o:p></o:p>
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Enfin, on rentra à Régny, où l’on s’arrêta quelques instants pour se restaurer. M. Faure fit l’appel, nous étions 49. On délibéra et, en dépit de la faiblesse de notre troupe, la marche en avant fut résolue. Nos camarades prirent à Régny un guide qui s’offrit spontanément à nous accompagner.<o:p></o:p>
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Parvenu au hameau de la Verpillière, ils trouvèrent les sentinelles ennemies d’autant plus sur leurs gardes que sur le bruit qu’ils faisaient en marchant. Les chiens des fermes avaient constamment aboyés. Alors qu’ils croyaient n’avoir à faire qu’à des cavaliers, ils reconnurent qu’ils étaient en présence d’un bataillon fort d’environ 400 hommes, car ils comptèrent une cinquantaine de feux composés ordinairement d’une huitaine de soldats. Arrivé depuis la veille ce bataillon était campé dans un vaste pré entouré de haies touffues.<o:p></o:p>
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On forma le cercle pour délibérer et on parla de s’en retourner, mais un accident en décida autrement. Pendant le colloque, deux baïonnettes s’entrechoquèrent. Une sentinelle autrichienne aux aguets, cria deux fois : « Wer da, wer da ? » Un des volontaires, Butignot, qui avait fait des campagnes en Allemagne répondit : « Freunde ». Au même instant une balle traversa le chapeau du guide Depierre. Le Sr. Thiodet armé d’un fusil double, riposta et coucha dans la boue la sentinelle qui venait de tirer.<o:p></o:p>
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L’affaire ainsi engagée, il ne restait plus qu’à agir. Le Commandant Faure divisa sa petite troupe en deux pelotons, le premier, placé en avant, devait opérer une diversion sur la droite des Autrichiens ; en arrière avait été disposé l’autre et tout près deux tambours qui reçurent l’ordre de battre bruyamment la charge à un signal donné. M. Faure s’étant aperçu qu’un groupe de cavaliers établi dans la remise de l’hôtel Flandre, pouvait prendre les nôtres entre deux feux pendant qu’ils auraient à faire aux fantassins, s’y porta rapidement suivi de quelques volontaires. Il y entra résolument le premier une carabine à la main. A ce moment il faillit être tué : un Autrichien l’ajusta de son pistolet à bout portant, mais un volontaire fit dévier le bras du cavalier avec son fusil et lui enfonça sa baïonnette dans le ventre. M. Faure et ses hommes désarmèrent sans résistance une sizaine de Hussards qui se préparaient à monter à cheval et les firent prisonniers.<o:p></o:p>
Un cavalier déjà en selle allait sortir, quand le sieur Pierre Rey l’arrêta et, le retenant par la jambe, le força à remettre pied à terre et à lui livrer ses armes.<o:p></o:p>
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Cette affaire de l’auberge terminée en un clin d’œil, le commandant s’occupa des fantassins campés dans le pré. Il dispersa sa troupe afin de donner moins de prise au tir des Autrichiens et leur faire croire aussi qu’ils étaient attaqués par des forces supérieures. La fusillade commença ; la distance étant très rapprochée nos Roannais tiraient à coup sûr. L‘ennemi, qu’ils voyaient parfaitement à cause de ses feux de bivouac, ne les apercevait pas, parce qu’il était ébloui. Aussi malgré plusieurs décharges aucun des volontaires ne fut atteint ; d’ailleurs ils étaient quelque peu garantis par la haie entourant le pré. Soudain, au signal du commandant, les tambours battent furieusement la charge. Les Autrichiens se croyant attaqués par toute la garnison de Roanne, s’enfuient en désordre, saisis d’une véritable panique. On aurait pu charger dix chariots avec les sacs, armes, les bagages et les provisions, qu’ils abandonnèrent dans leur fuite. Ils avaient perdu une soixantaine d’homme, morts et blessés ou prisonnier. Le Commandant Autrichien, le Major Fack, surpris dans son sommeil, se sauva à peine vêtu par la fenêtre d’un fenil. (Plus tard, après la rédition de Roanne celui-ci remplira les fonctions de Commandant de Place dans cette ville).<o:p></o:p>
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Les volontaires, après avoir cassé beaucoup de fusils, retournèrent à l’auberge Flandre, où ils prirent six chevaux ; il y eut un incident : le grand Laurent, entré un des premiers dans la cour, trouva armés de sabres, deux cavaliers à la porte de l’écurie. Il en coucha un en joue et le renverse. Il court sur le second, baïonnette baissée, mais celui-ci la saisit par la douille et empêche ainsi le Roannais d’en faire usage. Tout d’un coup Laurent se rue sur lui, l’étreint de ses mains vigoureuses, le renverse sur la litière et le transperce avec sa baïonnette.<o:p></o:p>
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La fusillade, le roulement du tambour, la fuite des Autrichiens avaient tour à tour, ému et rassuré les habitants de St-Symphorien. L’un deux nommé Ardaine, excellent patriote, était bien connu à Roanne, où il était venu plusieurs fois au péril de sa vie, apporter des renseignements sur les mouvements et les forces de l’ennemi. Or, après l’affaire, qui n’avait guère durée que quinze minutes, les sieurs Plassard et Charles Détras aperçurent Ardaine qui n’entendant plus de coups de feu était sorti devant sa porte. Le jour se levait. Les reconnaissants, il leur demanda leur nombre ; sur la réponse qu’ils étaient une cinquantaine, il leur conseilla de filer au plus tôt, car ils risquaient d’être cernés par l’escadron posté le long de la route de Roanne. Un cavalier vient de partir au galop et lui porter sans doute la nouvelle de ce qui vient de se passer. Il faut vous attendre à voir revenir l’escadron en toute hâte à Saint-Symphorien. <o:p></o:p>
Suivant ce prudent conseil les volontaires reprirent la route de Régny, et regagnèrent Roanne aidés par le Colonel Genty qui se porta à leur rencontre avec deux cents hommes, car un fort détachement de cavaliers ennemis manoeuvrait pour leur couper le chemin du retour.<o:p></o:p>
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Hélas, Ardaine qui avait été vu par un cavalier blessé, causant avec les deux volontaires, fut dénoncé par celui-ci, deux jours plus tard, lorsque ces cavaliers revinrent à la Verpillière, il fut alors fusillé. <o:p></o:p>
L’acte de décès N° 34, établi le 31 mars 1814, indique que Jean-François Ardaine âgé de 47 ans, « entrepreneur des routes », veuf de Jeanne Janson, est décédé ce jourd’hui à huit heures du matin. Toutefois, cet acte ne fait pas mention de quelle manière est survenu ce décès, ni si c’est à la suite d’un jugement.<o:p></o:p>
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Le 8 avril au matin, le général Ardegg était à Saint-Symphorien-de-Lay, d’où il signait un rapport adressé au Commandant en Chef de l’Armée du Sud : « Lorsque je quittai Lyon, le 6 avril, l’ennemi était à Feurs et à Tarare. Mes détachements le chassèrent du premier endroit, et ma marche sur Roanne, le fit se retirer sur ce dernier point. Jusqu’à cette ville, il n’y a plus d’ennemi sur cette rive de la Loire ».<o:p></o:p>
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Roger Garnier (ST-SYMPHORIEN-DE-LAY 1814 – 1816)<o:p></o:p>
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Note de l’auteur : Pour compléter, mes recherches faites en Mairie de Saint-Symphorien-de-Lay, je puiserai dans le livre de M. Abel Chorgnon, établi à partir des souvenirs de Jacques Chorgnon son père, soigneusement conservés et mis en ordre. Il est en effet intéressant de comparer les diverses versions de cette expédition, données par des personnes ayant vécu cette époque ou même participé aux évènements. Ceux-ci racontés avec une sincérité et une vérité qui donnent à ce récit la valeur d’us dévouement pris sur le vif.<o:p></o:p>
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